Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 : le défi des transports en quatre questions

 

Pendant les jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024, jusqu'à 600 000 spectateurs se déplaceront chaque jour en transports en commun en Île-de-France et 200 000 personnes accréditées se déplaceront également. Le plan de mobilité des JOP parviendra-t-il à éviter la saturation du réseau de transport francilien ? Le point en 4 questions.

 

Jeux Olympiques, Jeux Olympiques De Rio

Le CIO sélectionne la ville organisatrice des jeux Olympiques et Paralympiques, appelée "ville hôte", sur la base d’un certain nombre de critères, notamment sa volonté de générer des retombées durables pour le territoire et ses habitants : amélioration des infrastructures urbaines, modernisation du réseau de transports, aménagement de nouveaux espaces verts...

Une fois la ville élue, le CIO signe un contrat avec la ville hôte et le comité national olympique (CNO) du pays concerné. Un document intitulé "Conditions opérationnelles" du contrat ville hôte détaille un ensemble d'éléments essentiels pour le projet afin d'accueillir les athlètes et tous les participants aux JOP dans les meilleures conditions.
Aux termes de l'introduction de la partie relative aux transports : "Toutes les parties prenantes olympique et paralympique comptent sur des services de transport sûrs, efficaces, fiables et ponctuels pendant les Jeux.
Le secteur Transport doit tenir compte de l’ensemble des besoins des parties prenantes, y compris ceux des habitants de la Ville hôte et aligner ainsi la planification du transport aux Jeux sur les opérations existantes dans la Ville hôte.
Un programme de transport bien mené répond aux besoins de toutes les parties prenantes des Jeux et contribue à un héritage post-olympique positif en améliorant les systèmes de transport et en encourageant l'utilisation des transports publics dans la Ville hôte."

La ville hôte doit garantir que les routes et le système de transport public disposent d'une capacité d'accueil en adéquation avec le nombre de billets mis en vente pour les spectateurs.

Elle doit permettre l'accès gratuit aux systèmes de transports publics à tous les détenteurs de la carte d'accréditation olympique et paralympique (dans le cadre de leur fonction).

Le dossier de candidature Paris 2024 mettait en avant le fait que l’accueil des JOP à Paris ne nécessitait aucune infrastructure de transport supplémentaire. L'année 2024 devait coïncider avec les dernières échéances du projet du Grand Paris Express.
Ainsi devaient être achevés en 2024 : 

  • le prolongement de la ligne E du réseau express régional (RER) ;
  • les prolongements des lignes 12 et 14 du métro ;
  • les nouvelles lignes 15, 16 et 17 du métro ;
  • les tramways Nord et Ouest ;
  • le prolongement Ouest du tramway T1 ;
  • le CDG Express.

D'après le dossier de candidature : "Paris 2024 souhaite offrir le meilleur niveau de service possible en matière de transport aux membres de la Famille olympique et paralympique et aux spectateurs, tout en garantissant la mobilité des parisiens et le maintien de l’activité économique."

Le document affirmait qu'en Île-de-France, le réseau de transport était capable d'absorber la demande générée par les JOP grâce aux infrastructures existantes, aux nouvelles lignes de métro augmentant la capacité de déplacement et d’autres mesures du plan transport comme l'augmentation des fréquences, le déploiement de personnels supplémentaires ou une amplitude horaire élargie.
Le plan de transport des JOP permettrait :

  • "d’assurer la sortie des sites de compétition en une heure par le réseau de transport en commun ;
  • de transporter la main d’œuvre et les spectateurs grâce à un service de transports en commun prolongé ;
  • de répondre aux besoins de déplacements habituels des habitants d’Île-de-France et des touristes."

Par ailleurs, le dossier prévoyait que tous les détenteurs de billets pourraient voyager gratuitement sur l’ensemble du réseau d’Île-de-France le jour de la compétition concernée pour : 

  • réduire les émissions de carbone en favorisant l’utilisation des transports en commun ;
  • réduire la circulation routière et le besoin en parkings à proximité des sites.

Des craintes concernant l'offre de transport ont toutefois été exprimées à plusieurs reprises depuis septembre 2022.

En septembre 2022, l'audit des mobilités dans le cadre des JOP 2024 mené conjointement par l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable et l'Inspection générale de l'administration, pointait les risques liés à la fragilité du réseau ferré francilien et à la pénurie de personnels touchant les conducteurs de bus et d’autocars.

En janvier 2023, la Cour des comptes invoquait des risques réels sur les projets d’infrastructures, dans un premier rapport consacré à l'organisation des JOP : "Plusieurs opérations d’infrastructures, prévues ou non dans le dossier de candidature mais qui participeront fortement à la bonne tenue des Jeux, présentent des risques majeurs du fait de calendriers d’ores et déjà tendus et sans véritable marge de manœuvre. Si elles n’étaient pas achevées pour les Jeux, il en résulterait une tension difficilement soutenable sur les lignes fortement sollicitées, avec les risques associés d’incidents et d’engorgements pour les usagers du quotidien. De tels phénomènes contribueraient à dégrader fortement l’acceptabilité de l’événement pour la population."

La Cour fait référence :

  • au chantier Éole (RER E), devant assurer une amélioration de la desserte de l’Arena de Paris La Défense ;
  • aux prolongements de la ligne 14 (permettant de desservir le Stade de France, le centre aquatique olympique et le village des athlètes, via la gare de Saint-Denis-Pleyel et le franchissement urbain Pleyel associé, pour la partie nord et l'aéroport d’Orly, pour la partie sud).

En juillet 2023, la Cour des comptes a renouvelé ses avertissements dans un rapport complémentaire : "Au-delà de la question du transport des spectateurs et de l’enjeu d’image que constitue l’aboutissement des différents chantiers pour les organisateurs des Jeux, ces projets d’infrastructures demeurent essentiels pour assurer la fluidité des flux (voyageurs du quotidien, personnes accréditées, personnels et spectateurs) pendant les Jeux. Il est donc impératif que les chantiers d’infrastructures essentiels au bon déroulement des jeux (Éole, Porte Maillot, ligne 14, franchissement urbain Pleyel, gare du Nord) soient conduits à leur terme dans les délais prévus."

Un rapport parlementaire, également publié en juillet 2023, mentionne les risques liés aux transports : "[...] jamais les transports franciliens n’ont aussi mal fonctionné. Cela est dû à plusieurs facteurs, confirmés par l’ensemble des acteurs auditionnés par les rapporteurs : les retards des chantiers du Grand Paris Express (GPE), le déficit de personnels pour la conduite des bus et l’augmentation de la fréquentation des transports en commun sur un réseau dont la fréquence avait été revue à la baisse lors de la crise de la covid-19 et qui n’a jamais retrouvé son rythme pré-pandémie.
[...] Ces retards de chantiers vont donc avoir pour effet de contraindre un réseau d’ores et déjà en tension et de multiplier les risques d’incidents ou d’engorgements. Si, en particulier, certaines lignes de métro n’étaient pas achevées pour les Jeux, cela contribuerait à dégrader fortement l’acceptabilité de l’événement pour la population."

Toutefois, devant la commission des affaires culturelles et de l'éducation, à l'Assemblée nationale le 9 avril 2024, la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra, a déclaré : "Concernant les transports, nos grands chantiers d'infrastructures sont également parfaitement dans les temps, comme en atteste le lancement réussi, sous l'égide de la RATP, du nouveau système de pilotage automatisé de la ligne 14 qui sera la colonne vertébrale de la desserte des Jeux. Les plans de transport sont stabilisés avec, sur de très nombreuses lignes, une offre renforcée de 15%, et, si nécessaire, jusqu'à 60%."

Le dossier de candidature prévoyait une baisse de fréquentation des transports d’environ 30% au mois d’août 2024 en raison des vacances scolaires estivales. Cependant, en termes d'acceptabilité des JOP par la population, la question des transports présente de forts enjeux.

Des voies olympiques ont été fixées par un décret de mai 2022 à la suite de l'ordonnance du 20 mars 2019 et seront accessibles, pendant la durée des JOP, aux accrédités, aux véhicules de transports en commun, aux taxis, aux véhicules de transport des personnes à mobilité réduite, ainsi qu’aux véhicules de sécurité et de secours.
Elles ont été déterminées pour permettre l’accès aux sites de compétition situés dans un rayon de 10 kilomètres du village Olympique en moins de 30 minutes (et une stabilité du temps de transport au-delà de 10 kilomètres).

Le rapport d'audit de septembre 2022 des mobilités dans le cadre des JOP 2024 invite à "préciser le calendrier et les modalités de mise en service des voies olympiques dans le but de gêner le moins possible les usagers du quotidien et définir une doctrine réaliste de contrôle-sanction."

En effet selon le rapport : "[...] une certaine tolérance devra ponctuellement être observée en cas de congestion de la circulation générale d’une part et d’absence de trafic sur les voies olympiques d’autre part, sauf à compromettre l’acceptabilité sociale des Jeux."

Pour protéger les sites des JOP, des périmètres où la circulation automobile sera limitée ou interdite sont également prévus.

Pour anticiper l'impact des JOP sur les déplacements quotidiens, le gouvernement a créé le site internet "anticiperlesjeux.gouv.fr" qui propose des conseils et des outils d'aide à la préparation des trajets et une carte qui indique les prévisions d'affluence dans les transports en commun et les restrictions routières.

Si la communication axée autour du site fait valoir un renfort inédit de l’offre et le déploiement de nouvelles infrastructures de transports, elle invite également à :

  • diminuer ses déplacements ;
  • décaler ses horaires de trajet ;
  • dévier son itinéraire ;
  • se détourner de son mode de transport habituel.

La suppression de la gratuité des transports collectifs pour les spectateurs

La gratuité des billets de transports collectifs pour les détenteurs de billets pour les jeux constituait l’un des engagements du dossier de candidature.
Les différentes optimisations recherchées lors du processus de révision du budget pluriannuel du comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques(COJOP) en 2022 ont conduit à l’abandon de la prise en charge de la gratuité pour les spectateurs, le budget correspondant étant chiffré par le COJOP à 44,7 millions d'euros. Le budget pluriannuel révisé du COJOP maintient en revanche la prise en charge des transports collectifs pour les personnes accréditées, avec un budget de 6,3 millions d'euros.

En savoir plus : https://www.vie-publique.fr/questions-reponses/293540-jeux-olympiques-de-paris-2024-le-defi-des-transports-en-4-questions