Ariane Mnouchkine ouvre le festival du Printemps des Comédiens
Ariane Mnouchkine ouvre le festival du Printemps des Comédiens sur notre monde nouveau
25 ans après, Ariane Mnouchkine revient au Printemps des Comédiens pour nous présenter la dernière œuvre du Théâtre du Soleil créée à Pondichéry en janvier 2016 : « Une chambre en Inde », pièce foisonnante d'histoires drôles, dramatiques, tragiques racontées dans toutes les langues, chantées, dansées et jonglées dans un festival de spectacles.
Pour l'occasion, le vaste plateau du théâtre J-C. Carrière a été élargi au maximum pour pouvoir accueillir le magnifique intérieur d'une maison tropicale dont les persiennes latérales filtrent une lumière et surtout une atmosphère bruissante faussement apaisantes.
De ce fait, les loges sont installées dans l'entrée offrant à la vue de tous les spectateurs les préparatifs rituels de l'Office qui va commencer, façon de rendre au théâtre son origine sacrée. Devant une salle comble de têtes chenues ( les jeunes générations ont pourtant un jour ou l'autre vu le « Molière » d'Ariane...) se déroule un spectacle comme on en voit peu. Après le choc des attentats de 2015, dans une chambre, en Inde où elle doit monter un projet, une comédienne contemporaine issue de la Comedia del Arte, souffre des affres des responsabilités qui lui sont imposées et aspire au sommeil, réservoir de songes. Ceux-ci apparaissent sous la forme d'un foisonnement de saynètes jouées par des comédiens aux multiples talents et convoquant toutes les formes de théâtre et de toutes origines. Certaines dont les intrigues passent de la mythologie à des faits d'actualité sont organisées comme des séries, interrompues puis reprises quelques scènes plus loin, d'autres sont des apparitions des mannes d'illustres prédécesseurs d'Ariane, du Mahabharatha à Charlot en passant par Shakespeare et d'autres moins illustres. Derrière ce chaos apparent, l'argument est très charpenté suivant deux constructions, l'une stellaire autour de l'héroïne magnifiquement jouée par Hélène Cinque mais aussi linéaire, tendue vers le questionnement sur la société, le théâtre et l'être humain provoqué par les attentats de 2015 et qui bouleversent la comédienne.
Où en est cette société mondialisée ? Comment combattre le désespoir engendré ?
Peut-on encore faire du théâtre après cela, et du théâtre comique ? Le Théâtre du Soleil y réussit très bien, il habille le tragique d'éléments comiques et le spectacle est beau, drôle, poétique et transgressif à souhait, rendant aux spectateurs la force de se battre contre la soumission et pour la liberté. La réalisation de cette œuvre a mobilisé au moins soixante dix personnes parmi lesquelles environ 50 comédiens, chanteurs, danseurs, acrobates dont certains appartiennent à une troupe de théâtre venue d'Inde : la Kalaimamani Purisai Kannappa Sambadan Thambiran spécialisée dans une forme de théâtre traditionnel le Theru Koothu qui reprend les histoires de la mythologie indienne puisées dans le Mahabharatha et le Ramayana. Un grand bravo et un immense merci à tous les acteurs, aussi excellents les uns que les autres, de ce spectacle qui nous a réjouis durant 3 heures et demie. Si vous désirez vous enivrer d'autres épisodes du Mahabharatha, rendez-vous samedi 3 juin à 17h sous le chapiteau de la Pinède avec Jean-Claude Carrière pour 2 heures de lecture de ce patrimoine de l'humanité.
Publié le 1er juin 2017 par A.K.
Le Printemps des Comédiens du 30 mai au 1er juillet 2017
Réservations : 04 67 63 66 66