Retour du prodige Lukas Geniusas au festival de Radio France
A la Journée du piano russe au Festival de Radio-France Occitanie Montpellier, re-découverte d'un jeune virtuose
Le jeudi 20 juillet était consacrée au piano russe avec des compositeurs connus et d'autres encore inconnus. Le concert de 18 h, exceptionnellement payant ce jour-là, accueillait une étoile montante du piano classique Lukas Geniusas, Lithuanien âgé de seulement 27 ans, déjà rencontré au Festival en 2012 et issu d'une lignée de musiciens.
A cette heure-là et surtout avant un concert très attendu à 20 h 30, la salle Berlioz n'était qu'à moitié pleine. Mais ceux qui étaient venus, n'ont pas regretté de rencontrer ce jeune virtuose. Il entama et termina le concert avec des préludes de Rachmaninov, forme courte qui convenait parfaitement à cette musique légère et pleine de grâce qui entraîne à la rêverie et que le jeune pianiste interpréta avec une sensibilité enchanteresse. Ses doigts effleuraient à peine les touches conférant aux notes la pureté des carillons de cristal. Si Rachmaninov prolonge la tradition romantique, il n'en exprime pas moins des accents très novateurs qui se répandaient à l'époque avec Debussy ou Fauré et que l'on compara à l'impressionnisme.
La sonate n°5 en do Majeur de Prokofiev qui suivit, écrite en 1923 lors de son exil en Europe puis revisité en 1952 en Russie, exprime la souffrance du compositeur déchiré entre son amour pour sa patrie et son désir de liberté impossible à assouvir. Lukas Geniusas sut très bien mettre en évidence par la netteté de ses notes, surtout les dissonantes du 1er mouvement, la modernité du compositeur. Et dans le 2ème mouvement, par la nette opposition qu'il donna aux jeux contradictoires des deux mains, la droite jouant une valse lente et la gauche un continuum saccadé évoquant une marche forcée d'automates, il exprimait la souffrance du grand musicien, exilé. Quant au 3ème mouvement, il fut beaucoup plus libéré, presque solaire.
La deuxième sonate de Prokofiev n°2 en ré mineur, écrite en 1912 avant la guerre et la révolution demandait à la fois beaucoup de rapidité et d'agilité surtout dans les deuxième et quatrième mouvements pour exprimer la jubilation qui habitait alors le compositeur et de sensibilité dans les envolées lyriques des 1er mouvement et 3ème mouvements. Lukas Geniusas qui excella dans l'opposition entre les deux motifs rythmiques prouva sa virtuosité.
Puis le jeune Lithuanien nous fit découvrir Vsévolod Zaderatski, compositeur, persécuté en son temps par les autorités soviétiques pour avoir combattu dans l'Armée Blanche et qui sort de l'ombre depuis quelques années grâce au pianiste Jascha Nemtsov. Ce compositeur exprime dans les préludes et fugues, qui ont échappé aux autorités qui en ont brûlé bien d'autres, un élan vital peu commun rendu par le rythme de la fugue, de la fuite et l'égrènement de notes plus ou moins discordantes sorties d'un rêve éveillé remarquablement exécutés par Lukas Geniusas.
Dans les morceaux supplémentaires qu'il a offerts au public, il a montré qu'il éprouvait quelque affinité avec le jazz.
Publié le 20 juillet 2017 par A.K.