Les secrets de La Monédière
Samedi 11 août, c'était "journée portes ouvertes" à Bessan dans ce lieu-dit, devenu un haut lieu de l'archéologie. Au sud du village, après le cimetière neuf, sont menées des fouilles qui ont livré des résultats prometteurs pour l'histoire régionale. Mais La Monédière a-t-elle livré tous ses secrets ?
Cette modeste éminence fut soupçonnée, dès 1934, d'abriter les restes d'un habitat ancien. Elle domine la plaine d'une dizaine de mètres et se situe non loin de l'Hérault. Soupçons confirmés dès les années 1970 quand des fouilles ont permis d'évaluer son importance régionale et lors de fouilles préventives en 2014. En 2017, a commencé un programme de fouilles, en principe de 3 ans. Universitaires, chercheurs du CNRS et archéologues des collectivités locales encadrent pendant 3 mois des étudiants bénévoles issus des universités françaises et étrangères.
Tous unissent leurs efforts pour faire parler le sous-sol. L'on sait aujourd'hui qu'au VIème siècle avant notre ère les 4 ha du site étaient entourés d'une puissante fortification : cette muraille à soubassement de pierre et à élévation de briques crues dominait un fossé large de 10m, de 4m de profondeur. Le tracé du système défensif est orthogonal, tout comme le canevas urbain.
Ce "plan d'urbanisme" est totalement original en milieu indigène. Influence extérieure, méditerranéenne ? En tout cas, un schéma d'organisation préétabli et respecté par la communauté structurée. Dos au site, au nord, face à l'emplacement des dernières maisons actuelles, était une porte monumentale permettant le passage des cavaliers et charrois.
Au-delà, commence une large voie soigneusement ménagée. On ne retrouvera pareil soubassement qu'avec les Romains. A l'est de cette voie, est apparu l'espace d'habitation. En 200 ans, se succèdent 7 phases d'occupation, parfois entrecoupées d'épisodes de destruction par le feu. Or, à La Monédière, si on reconstruit, c'est différemment. Les maisons sont tantôt rectangulaires, tantôt absidiales. Quels étaient les mécanismes sociaux-culturels en cours ? Ils restent secrets. Mais l'on connaît la nourriture grâce aux graines mêlées aux cendres des incendies. Le mobilier domestique (jarres, amphores). Et certaines coutumes. Enfants morts et nouveaux nés enterrés dans des fosses proches. Et l'on sait aussi que les commerçants grecs remontaient l'Hérault depuis la mer (plus proche à cette époque) et déchargeaient à Bessan les amphores de vin. Ce vin que l'on consommait sur place et qui était redistribué dans toute la région, abreuvant ce qu'un historien a appelé "la soif celtique". Agriculteurs, commerçants, grecs et "gaulois", ont occupé le site jusque vers 425. Et l'on sait que Rome a laissé son empreinte sur le site, puisqu'au-delà du mur s'élevait un ensemble thermal. Un fragment de bassin en témoigne. Et une citerne.
La voûte de la citerne est peut-être médiévale car à cette époque, l'homme était à nouveau présent. Un fossé protecteur, profond de 6m, l'atteste. Alors, on a creusé davantage et trouvé, sous le ciment romain, des restes de -2400 av J.-C. (époque Néolithique). Décidément, quand La Monédière parle…
Hervé Le Blanche