Renaud Capuçon aux confins de l'empire de la Musique Russe

Hier soir avec le concert dont la vedette était le violoniste Renaud Capuçon, les festivaliers ont poursuivi leur cheminement au sein de la musique russe et du centenaire de l'année 1917, thème de l'édition cette année du festival de Radio France Occitanie Montpellier.  


Dans un Corum archi bondé, s'envolèrent les notes fluides de la Khovantchina de Modeste Moussorgski, prélude d'un opéra laissé inachevé par le compositeur et revisité par Rimski-Korsakov C'est une très courte pièce d'atmosphère selon les propos du présentateur de ce concert retransmis en direct sur France-Musique et rebaptisée parfois : « Matin sur la Moskova ». Allant crescendo, elle évoque une chanson folklorique pleine de nostalgie avec carillon dans le lointain. Personne n'applaudissant cette œuvre inconnue, Emmanuel Krivine à la tête de l'Orchestre National de France dut insister sur l'arrêt. Ce fut donc une véritable et agréable découverte pour tous.

Le violon, instrument roi de l'âme russe

Dans un fracas de cuivres, suivit le concerto pour violon et orchestre en ré mineur tant attendu d'Aram Khatchaturian, interprété par Renaud Capuçon qui l'abordait pour la première fois de sa carrière. Très vite, la partie violon tempéra la violence de l'introduction, gardant un rythme endiablé et répétitif qui évoquait un train traversant de vastes plaines. Le virtuose se montra tel qu'on l'attendait, immergé dans sa musique corps et âme.
Au deuxième mouvement, la voix grave et ondulée du basson révéla une musique plus slave, reprise par un violon plus plaintif et soutenu par des contre-basses dans une inexorable marche en avant.
Le troisième mouvement débute comme le premier par une cavalcade des cuivres suivie d'une danse très rapide jouée par le violon. L'orchestre reprend le thème du début et la danse prend la forme d'une ritounelle comme dans une fête populaire.

De famille arménienne mais né en Géorgie, Khatchaturian est un compositeur classique qui s'est plié sans trop d'effort aux diktats gouvernementaux soviétiques lorsqu'ils allaient dans le sens de sa propre nature : l'expression de la sensibilité slave.
Renaud Capuçon fut, bien sûr, ovationné par la salle à qui il rejoua avec une grande sensibilité, un des soli de violon. Il signa tous les autographes que l'on voulait à l'entracte.

Richesse du répertoire russe de Moussorgski à Tchaïkovski

La troisième œuvre au programme était la symphonie n°2 en ut mineur de Tchaïkovski, appelée aussi « Petite Russie » car l'auteur, d'origine ukrainienne avait commencé à l'écrire à Kiev où il séjournait souvent. Par ce titre, il fait ainsi allusion au fait que Kiev, capitale de l'Ukraine, fut en 881 la première capitale de la Russie.

Le premier mouvement s'apparente à une variation sur la chanson populaire : « En descendant la Volga » avant d'enchaîner sur un vif allegro.
Le deuxième débute sur un solo de la grosse caisse qui n'est pas sans rappeler la marche des chasseurs dans Pierre et le loup de Prokofiev mais le cœur du mouvement prend une allure lente et lyrique qui lui confère une certaine gravité. Il est extrait de « Ondine », opéra perdu du compositeur.
Le troisième mouvement est sans doute le plus insolite. Son introduction de contre-basses jouées cordes pincées, ses envols de cris d'oiseaux et ses syncopes lui confère une atmosphère à la fois champêtre et étrange.
Le finale se compose d'une alternance de deux thèmes, l'un solennel produit par les cuivres et l'autre plus prosaïque, par les violons qui jouent la variation sur la chanson folklorique « la Grue ». Cette alternance passe peu à peu d'un registre lyrique à un autre plus dramatique juste avant la fin traditionnelle en forme de reprises puis de conclusion.

L'Orchestre National de France, Krivine et Capuçon triomphent

L'Orchestre National de France, dirigé par Emmanuel Krivine qui prendra ses fonctions de nouveau directeur musical à partir de septembre prochain à Radio France pour le concert de rentrée, fut très chaleureusement applaudi et avant le bis, le chef a tenu, devant toute la salle, à exprimer sa reconnaissance à l'une des violonistes de l'Orchestre national de France, Brigitte Angélis qui part à la retraite après 37 années de maison, durée qui permet d'instaurer une cohésion au sein d'un groupe qui ne peut que bénéficier à l'orchestre tout entier et qui ne peut se concevoir que par amour du métier et, en l'occurrence, de la musique.

Ce fut là un bel hommage auquel tous les Festivaliers se sont joints.

Prochains concerts au Corum :
- vendredi 21 juillet à 20 h : "De Moscou à Rome" avec l'Orchestre National de Lille et Alexandre Bloch à la direction.
- samedi 22 juillet à 20h : l'opéra Siberia avec la soprano Sonya Yoncheva et Domingo Hindoyan à la direction.

Publié le 20 juillet 2017 par A.K.